FortiPhi

Fortiφ : Quand la géophysique éclaire simultanément le patrimoine, la géologie et les risques côtiers.

Au sommaire

Cette partie du projet correspond au stage de master de Robin Piel, qui s’est déroulé de mars à août 2021, grâce à l’appui et au soutien financier de l’OSUNA.

Au cours de son stage, Robin a :

  • Participé à la mise en place de la frise chronologique des tempêtes
  • Réalisé une frise chronologique des différentes phases d’aménagements de la Pointe de la Petite Conche, du Fort Neuf et du Fort Gauthier. (pas encore disponible pour des raisons d’accord universitaire avec Tiki Toki)
  • Mené une campagne de prospection géoradar dans le périmètre de ces trois sites.

Pour comprendre les enjeux et les objectifs de cette partie du projet

Principaux résultats

Cette campagne a notamment permis de constater les éléments suivants.

  • La dune à l’ouest du Fort Gauthier a globalement engraissé d’environ 1 m depuis l’époque napoléonienne, ce qui signifie que cette dune possède bien des capacités de résilience. Ces dernières ont vraisemblablement été favorisées par la pose récente (une dizaine d’années) d’un système de ganivelles.
  • Le creux topographique situé en arrière de la plage du Puits Marie-Françoise et juste au nord de la Pointe de la Petite Conche n’est pas un creux naturel. A cet endroit, une grande quantité de sable a été prélevée. Ce prélèvement a vraisemblablement eu lieu à l’époque Napoléonienne. En effet, à cette époque, la construction d’un fort a été entamée sur la Pointe de la Petite Conche. Finalement abandonné, le projet a laissé derrière lui une portion de rempart aujourd’hui toujours en place, dont la construction a probablement nécessité le prélèvement de sable dans les zones adjacentes. A l’heure actuelle, ce “creux” artificiel pose problème car l’érosion côtière à l’oeuvre sur la plage du Puits Marie-François pourrait rapidement amener la mer à s’engouffrer à l’intérieur, menaçant les habitations alentours (voir Sentinelles de la Côte, site du Puits Marie Françoise). Dans ce secteur, la présence du socle rocheux a également été repérée sous la dune. Ce dernier ne s’élève pas très haut au dessus du niveau des plus hautes mers, mais il pourrait néanmoins ralentir le processus d’érosion si l’eau venait à s’engouffrer dans la dépression.
Profil géoradar réalisé parallèlement au massif dunaire, au nord-ouest de la Pointe de la Petite Conche
Profil géoradar réalisé parallèlement au massif dunaire, au nord-ouest de la Pointe de la Petite Conche
  • La dune située au sud de la Pointe de la Petite Conche est probablement une ancienne flèche littorale, qui barrait l’estuaire d’un petit cours d’eau provenant du marais de la Gorelle. Ceci indique qu’à cet endroit de l’île, pendant la construction de la dune, les apports de sable venaient majoritairement du nord-ouest (dérive littorale). Les observations géophysiques ont également permis de montrer que cette portion de dune, aujourd’hui mise en péril par l’érosion côtière (voir Sentinelles de la Côte, site de la Petite Conche), a en outre été très remaniée à l’époque allemande.
  • Le fort Neuf est construit au sein d’un massif dunaire épais. Ce massif s’est formé par une première phase de stockage de sable, qui a permis au massif de progresser rapidement en direction de la mer. A suivi une phase de divagation de petites dunes qui, en montant les unes sur les autres, ont permis au massif d’atteindre par endroit une altitude de près de 8 m. Dans les années 1980, une phase d’érosion intense a entaillé ce massif. Il semble que celle-ci soit sans précédent dans ce secteur au moins à l’échelle du dernier millénaire. Heureusement, en 1985-1986, cette tendance érosive s’est inversée, et la dune a rapidement regagné entre 20 et 40 mètres. Ceci montre que la capacité de résilience de la dune à cet endroit est de l’ordre du millier de mètres cubes par an !
Profil géoradar réalisé transversalement au massif dunaire, au nord du Fort Neuf
Profil géoradar réalisé transversalement au massif dunaire, au nord du Fort Neuf

Le stage de Master FortiPhi

En 2021, Robin Piel a réalisé un stage de Master 2 intitulé Comprendre l’interaction Fortifications/dunes côtières de l’île d’Yeu (approche historique et géophysique). Au cours de ce travail, Robin a retracé l’histoire de trois sites fortifiés de l’île d’Yeu, afin de définir les grandes phases de construction/reconstruction des édifices. Il a ensuite réalisé une campagne géophysique permettant de visualiser l’agencement phases de croissance dunaire par rapports à ces différentes phases de construction des fortifications. Ce travail a permis de dater certaines phases de croissance dunaire et ainsi d’évaluer la vitesse de croissance des dunes à l’île d’Yeu

Dendrochronologie expérimentale

A la marge du projet FortiPhi, une campagne d’échantillonnage a été réalisée sur des arbres du littoral pour faire de la dendrochronologie 

  • DendroQUOI ?  La dendrochronologie consiste à étudier la croissance des arbres, et en particulier leurs cernes annuels. Si l’on connait la date de coupe de l’arbre, toute anomalie de croissance (arrêt, accélération, déformation) peut être datée en comptant les cernes annuels à rebours. Selon le registre météo historique et la manière dont l’arbre a réagi, on peut alors retrouver le phénomène responsable, ou au contraire, déceler et dater un phénomène inconnu, lorsque l’on ne dispose pas de registre.
  • Dans notre cas précis il s’agit de regarder comment les arbres du littoral de l’île ont enregistré dans leur croissance les tempêtes du dernier siècle (et peut être plus!). L’objectif de cette première campagne prospective était donc de trouver des arbres anciens, pour comparer leurs cernes de croissance et tenter de retrouver les “années de tempêtes”.  
  • Mis en parallèle du registre des tempêtes que nous mettons actuellement en place, cette démarche nous permettra mettre en relation les tempêtes “retenues par l’homme”, et celles “retenues par l’environnement” !
  • Ce travail fastidieux a été confié à Armelle Decaulne, du laboratoire LETG Nantes. Les arbres échantillonnés en 2021 sont deux acacias vieux d’environ 80 ans, qui ont poussé en plein vent à Ker Châlon ! L’échantillonnage du premier a été réalisé à travers le tronc grâce à un dispositif de carottage manuel. Le second ayant été coupé il y a quelques années, nous avons pu récupérer directement une tranche complète, beaucoup plus pratique pour observer la variabilité spatiale de la croissance des cernes! 
  • A l’heure actuelle le plus gros tronçon a été retaillé et préparé pour qu’Armelle puisse l’analyser au laboratoire. Les analyses sont en cours !